03 septembre 2020

Réponse à BHL

Réponse à la tribune de Bernard-Henri Levy parue dans le Figaro du 30/08/2020.


BHL : Cette fois, nous y sommes.

Moi : Oui

Nous regardions, interloqués, au début de l’épidémie, les lointains pays d’Asie porter le masque comme un seul homme.

Pas seulement au début de l’épidémie. Le port du masque est répandu et fait partie de la culture en Chine, au Japon… Nous regardions amusés ou intrigués, en tous les cas extérieurs à cette « coquetterie » asiatique. C’est notre sentiment de supériorité, notre condescendance, notre nombrilisme aussi.

Et nous nous disions que leurs traditions de discipline favorisaient cette mesure extrême qui, dans nos contrées, était inconcevable.

Oui

Or est-ce l’effet d’une psychose?

Que nous « y soyons » ? Psychose est un terme très fort. Si c’en est une elle peut s’expliquer. La fouille systématique à l’entrée des salles de concert après le Bataclan était-il l’effet d’une psychose ? Sommes nous en train de surréagir au traumatisme de mars ? Les hôpitaux en passe d’être submergés, le personnel soignant en état de rupture, les morts (j’en connais et des jeunes), les malades, les séquelles ? Nous y reviendrons mais c’est exactement là que l’argumentaire de BHL ne tient pas.

De la grande misère épistémique d’un pouvoir médical qui n’a jamais étalé si naïvement ses revirements et ses doutes?

On pourrait croire ici que les « revirements » et « doutes » ne sont pas censés faire partie de la science. Mais il n’est ici stigmatisé que l’étalement. Dans ce cas où est la misère épistémique ? La misère épistémique se nicherait plutôt selon moi dans la certitude du populisme scientifique qu’on a vu naître pendant cette crise.

Est-ce l’obligation que se sont infligée les gouvernements de faire quelque chose, et de le faire coûte que coûte, face à une épidémie exponentielle mais qui ne voit croître, pour le moment, ni le nombre des morts ni celui des hospitalisés?

Nous y sommes. Défaut de logique ? Malhonnêteté intellectuelle ? Sophisme certainement. On ne voit croître ni le nombre de morts ni celui des hospitalisés justement parce qu’il y a eu une première vague (ou début de vague, premier mouvement, qu’importe) traumatisante et que les leçons en ont été tirées. Tout ce qui a été décidé et en particulier les injonctions critiquées dans ce texte sont justement ce qui permet d’éviter une nouvelle catastrophe. BHL, n’avez-vous réellement pas compris ?  Si nous voyions le nombre d’hospitalisés et de mort augmenter alors il serait trop tard !  

Les masques se sont abattus, cruels et laids, comme un fatum, sur les visages de chacun.

« Cruels et laids »… On appréciera en Asie.

Et nous ne pouvons plus marcher dans une rue, flâner ou nous affairer, sortir sur un coup de tête ou poussés par la nécessité, sans nous mettre sur les lèvres et le nez ce bout de tissu chirurgical.

Quelle horreur ! Quelle tragédie ! A bas le froid par la même occasion qui nous oblige à mettre des écharpes, des chapeaux…

Tous masqués.

Oui. Pour protéger nos parents entre autres.

Tous dissimulés.

Non, pas dissimulés. C’est une poésie bien pauvre que celle-là.

Et, au fond, tous muselés.

Ah… nous y voilà encore. Le retournement sophistique s’annonce encore avec sa traîne d’effets potentiels désastreux.

Oh! ce n’est pas notre liberté qui est bridée.

Non.

Ni, comme le disent les «anti-masque», notre parole.

Vous en faites partie des anti-masques qui d'ailleurs n’ont pas un discours homogène. Le vôtre vient se ranger dans les travées de cette réaction (dans tous les sens du terme) affligeante.

Mais c’est l’éloquence des visages qui n’ont plus à partager que les yeux.

C’est déjà pas mal. Mais vous avez peut-être raison, sacrifions une partie de la population et l’économie tout entière pour préserver l’éloquence des visages.

C’est le reste de la bouche (celle qui ne se contente pas d’émettre des sons mais qui traduit les émotions avant de les articuler, qui exprime une tendresse, qui se crispe dans une grimace ou s’autorise une ambiguïté) qui s’est brusquement tu.

Mise en lumière de la contextualisation du langage à travers le seul son… cela peut avoir certaines vertus. Abreuvés d’image, nous devons nous comprendre sans nous « voir » vraiment… Peut-être serait-ce une opportunité finalement ? J’utilise des arguments aussi sophistes que les vôtres ici. Il reste à la vision la gestuelle, les yeux… c’est une amputation bien petite. Tout juste une ectopie.

C’est la Joconde qui, en chacune et chacun, n’a plus l’air ni de sourire ni de s’en abstenir.

Terrible !

Et c’est, pour parler comme Emmanuel Levinas, l’éthique du visage qui se voit amputée de sa part d’infini.

Eh bien non car cette éthique ne passe pas uniquement par la bouche. Mais au fait ? Quid des masques transparents que l’on va voir fleurir de ci de là ? Cela atténuerait-il votre plainte ?

Alors, on nous dit qu’il s’agit d’une mesure d’exception et, par définition, provisoire.

Et, si tel était le cas, je serais le premier à le comprendre.

Mais n’est-ce pas, précisément, le contraire?

Non.

Et si l’on dégaine la plus radicale des mesures alors que l’on compte, encore une fois, beaucoup de cas mais peu de morts

J’ai répondu à ce sophisme.

 et que l’on craint une deuxième vague que nul, pour l’heure, ne voit venir,

On ne la voit pas venir parce qu’on la prévient.

cela ne veut-il pas dire que nous nous installons dans un monde où l’anormal devient normal - et ce en situation, non de crise, mais de crainte?

Le principe de précaution serait donc un symptôme de crainte ? Voire de panique ? Il y a ici un basculement terrifiant. Terrifiant pour tous ceux qui sont victimes des crises, sanitaires ou sociales.

Voilà la perspective qui me hantait dans Ce virus qui rend fou (ouh... ce texte finalement n'est-il pas juste une publicité pour un livre  ? Nous y reviendrons): le masque se banalise ; il devient une seconde peau, un vêtement qui va de soi et que l’on enfile sans y penser ; c’est sans lui que d’aucuns, de plus en plus nombreux, se sentent démunis et nus ; et je ne vois pas, à partir de là, pourquoi l’on ne continuerait pas de le porter au moment de la prochaine grippe saisonnière, et encore de la prochaine - et pourquoi cette condamnation au masque ne serait pas à perpétuité.

Oui comme au Japon, signe d’un véritable respect de l’autre et non d’une soumission coupable à un impératif de sociabilité catégorique. Qui n’a jamais vécu cette situation où on se précipite sur vous pour vous faire la bise juste avant de s’exclamer : "Oh ! au fait, j’ai une crève carabinée". Que n’aurais-je pas aimé qu’on m’épargne les 40° de fièvre justement en me prévenant ou en m’épargnant. Mais non ! Ici, quand on est malade, on s’en fout de refiler le virus à l’autre. Tant on aime l’autre !

Mais il y a un autre tournant.

Aïe.

C’est le sort qui est fait aux désormais fameux asymptomatiques.

La grande saloperie de cette maladie, oui. Sa grande perversité.

Qu’il y ait toujours eu, dans toutes les épidémies, des porteurs sains, cela va de soi.

Des porteurs sains de la grippe ? Qui peuvent la transmettre à quelqu’un qui ne sera lui pas porteur sain ?

Mais ce qui est nouveau, c’est la rhétorique qui va avec ce constat.

Une rhétorique de protection, de bienveillance, d’humanité, de respect.

C’est la remise au goût du jour, sous prétexte de précaution sanitaire devenue folle, de la formule du Docteur Knock: «Tout homme bien portant est un malade qui s’ignore.»

Dans le cas précis c’est, hélas, une réalité.

Et c’est l’idée, en train de s’imposer, d’un monde peuplé de malades sans le savoir qui, à l’inverse du malade imaginaire de Molière, seraient si profondément atteints qu’il faudrait déployer, pour eux, tout l’arsenal du dépistage, de la prophylaxie et, bientôt, quand les applications type StopCovid deviendront, elles aussi, obligatoires, de la mise à l’index et au ban.

Mise à l’index, au ban ? Une quarantaine de 14 jours ? Où êtes-vous BHL ? les mots n’ont plus de valeur soudainement ? Vous aussi allez crier à la dictature en France, vous aussi avez oublié ce qu’est une vraie dictature, une vraie mise à l’index ? Je ne peux pas le croire.

Nous n’en sommes pas encore là.

Ouf ! Mais alors quoi ? Vous faites de la prévention vous aussi ? Vous sortez ce texte comme principe de précaution contre la dictature ? Ironie.

Mais il faut prendre garde au renversement épistémologique qui ferait de ce malade sans symptôme le vrai malade ou celui qui, en tout cas, mérite d’être traqué avec la détermination la plus implacable.

Ah oui, je me souviens, on demandait (et encore maintenant) aux gens de mettre une capote, car ils pouvaient être porteurs du sida sans le savoir. Nous n’étions pas les « vrais malades ». Nous avions simplement adopté un comportement responsable de séropositif possible et pas celui de tueurs !

Et, même s’il faut tout faire pour protéger les plus vulnérables d’un virus qui peut se nicher, en effet, dans les corps sains, il faut le faire avec sagesse, discernement, mesure - en évitant de créer des villes irrespirables où l’enfant sera une menace pour ses parents, le voisin un poison pour son prochain et l’homme un loup pour l’autre homme.

Donc on a une sorte de « en même temps » ici. Vous, le pouvoir, vous avez raison de prendre ces décisions, mais en même temps, faites attention. S’agit-il de parler pour ne rien dire finalement ? Juste occuper un espace ? Un espace commercial ? Je peux le comprendre en fait. Mais nous sommes en temps de crise et cet espace commercial ici est obscène.

Les chaînes d’information ont créé la panique quand, dans la première phase de l’épidémie, elles nous infligeaient l’image d’un directeur de la Santé publique égrenant, telle une Pythie triste, le bilan épidémiologique de la journée.

Créer la panique ? Fantasme donc que la situation du système de santé en France ? Pourquoi avons-nous applaudi le personnel soignant tous les jours de ces deux mois de confinement ? A cause d’une panique créée de toute pièce ? Vraiment ?

Mais au moins dénombrait-on, à l’époque, des morts et des mourants.

« Au moins »… il faut passer ici l’ambiguïté de l’expression. 

Et puis non, je ne la passerai pas. J’y vois un vœu de mort. Un déni qui cache un désir.

Ce désir, c’est celui de la catastrophe, de la tragédie. Comme je vois dans les absurdes accusations de dictature faites au Président un désir de vraie dictature. J’y vois aussi la mascarade de la résistance.

Se proclamer Résistant contre un pouvoir qui vous le permet, quel délice ! Le beurre et l’argent du beurre.

Nous avons ici un « Viva la Muerte » sur lequel nous reviendrons.

Pas glorieux.

Alors que ce que l’on nous annonce là, chaque soir, avec la régularité métronomique des cours de la Bourse, c’est le nombre des «clusters», le chiffre des malades sans trouble (mince !)  mais «détectés» et le nouveau record des «cas enregistrés».

Aucune raison médicale ne justifie ces décomptes quotidiens et absurdes.

Médicale ? Non. Épidémiologique oui.

Aucun besoin de santé publique n’exige ce renversement de l’évidence et du bon sens qui fait dire aux malades sans pathologie: «Vous êtes doublement malades, car vifs ; doublement dangereux, car éclatants de santé ; nous n’avons pas le temps de nous réjouir de ce que, contrairement à la fable, tous ne soient pas frappés, car tous, parce qu’indemnes, sont les ferments de l’épidémie.»

Etre porteur sain n’est pas être non porteur. Encore un sophisme. Quand on peut tuer sans le savoir on fait attention. C’est ce qui faisait aussi aller nous faire tester avant des ébats pendant les années 80. Capote ou test positif. Oui c’est notre façon moderne de ne pas être trop décimés par le Réel, c’est-à-dire notre corps sur lequel nos fantasmes et nos élucubrations achoppent.

Nous avons une médecine qui, en un mot, quand elle fait son métier qui n’est pas d’aller se chamailler sur les plateaux télé mais de soigner, a bien assez de ressource, en Europe, pour traiter un mal où quelques-uns mourront Vous êtes Dieu ma parole pour décider du nombre acceptable de morts ! sans aller dire à tous: «Vous n’avez pas honte d’être insouciants? pas honte d’être, à votre insu, les acteurs tragiques du destin? ne vous sentez-vous pas coupables d’être, à votre corps défendant, les agents de la mort en ce monde?»

Et pourquoi pas un tel discours ? Nous sommes en crise, une crise planétaire. Oui le monde change, bascule. Je comprends que l’on veuille s’accrocher à l’ancien monde mais ça n’est pas possible. Nous avons affaire ici à un discours infantile en fait, bien tourné, cultivé, élaboré, mais non adulte. Ça peut être une fierté que de faire le "jeune" mais il faut le dénoncer comme tel : irresponsable, dangereux.

Car c’est peut-être de cela, à la fin des fins, qu’il s’agit.

Il y a une lutte séculaire, en Occident, entre les amoureux de la vie et les amoureux de la mort.

Et vous, vous êtes un amoureux de la mort. Vous la désirez. Vous l’appelez.

Il y a, au cœur de toutes les sagesses grecques, juives, chrétiennes, musulmanes ou athées, une ligne de partage qui sépare les biophobes des biophiles.

Parlez-en à Freud. Pulsion de mort et pulsion de vie. Les faces vont s’inverser vous verrez.

Et il suffit de penser à notre XVIIe siècle, il suffit de relire les Messieurs de Port-Royal avec leur jansénisme si coupable, si culpabilisant, si pénitent, et il suffit de se rappeler, face à eux, les «libertinistes» joyeux, vivants et libres pour savoir que cette querelle divise, plus qu’aucune autre, l’esprit français.

L’esprit français dont vous voulez être le défenseur, le chantre, le héros. L’esprit français qui a raté le tournant de la philosophie analytique et qui reste empêtré dans cette intellectualisation poétique à outrance héritée de Heidegger. Quel dommage ! Mais ça n’est pas votre faute pour le coup. Le débat philosophique actuel est passionnant, dynamique, virevoltant. Mais il n’a pas lieu en France, ni en français. Quel dommage ! Tout ça pour avoir méprisé Russel et Frege ! Raté aussi le tournant de la logique. La poésie métaphysique contre la logique et la philosophie analytique. Pourquoi pas ? Mais c’est obsolète, moribond.

Eh bien, je vois Paris bâillonné par ce chiffon bleu aseptisé ; je pense à cette esthétique de bloc opératoire qui imprime partout son style ; j’entends, alors que l’épidémie semble sous contrôle et que nous sommes loin, grâce au ciel (hum… déni du vœu de mort) , des scènes infernales des débuts (« où était ma jouissance » ? Je me permets ici de caricaturer, de pousser à l’extrême votre discours, un peu comme vous) , avec leurs hôpitaux débordés, leurs soignants exténués et les vieillards abandonnés à leur malchance d’être vieux (et les comorbidités ? Je connais des victimes qui n’étaient pas des vieillards. A-t-on le droit de les pleurer ?) , les maîtres de l’Opinion rendre coupables les jeunes gens de n’être pas plus mal en point, les guéris de n’avoir pas rechuté et les citoyens infantilisés de se relâcher ; et je ne peux m’empêcher de penser que, derrière l’impatience des chiffres matraqués comme des mantras, il y a quelque chose de cette querelle qui est en train de se rejouer.

Je ne peux pas m’empêcher de penser que derrière ces sophismes dangereux, il y a ce vœu de mort, peut-être pour compenser une vie devenue triste, ou la notoriété n’est plus ce qu’elle était, ou plus simplement où l’âge, ce Réel bouffeur de fantasmes et d’espoir, nous coupe de plus en plus de la vie excitante que nous avons connue. Je pourrais encore accepter ces jeux conceptuels si nous n’étions pas en crise.

Nous ne sommes certes pas en guerre, mais c’est un combat. Vous n’allez quand même pas regretter les millions de chômeurs, les milliers de faillites, les millions de nouveaux pauvres si par malheur nous parvenons aussi à combattre la crise économique ?

Avez-vous raison réellement contre le monde entier ? Ce monde où il n’y a pas moins de penseurs ?

Un jansénisme sans Jansénius, sans Augustin, sans Pascal et sans Philippe de Champaigne.

Un jansénisme pour les nuls, gris et chagrin, qui n’est peut-être que le nouvel habit, trop grand, de l’humanité moutonnière de toujours.

Ah ! Une nouveauté: le mépris.

Nous étions des couards et maintenant des moutons.

Mais un jansénisme roué qui, à la façon d’un diable dont la ruse suprême était, selon Baudelaire, de faire croire qu’il n’existe pas, se déguiserait en son contraire, prêcherait le culte de la vie alors qu’il expie l’inconvénient d’être né et n’exigerait mortification et pénitence qu’au nom de l’impératif de sauver les corps.

Je vous retourne l’argument. Facile.

La peur, oui.

Où se situe la vôtre ?

La panique, bien entendu.

Vous pleurnichez pour le port d'un simple masque. Vous faites partie du peuple des chochottes.

Mais, tapi derrière elles, leur vrai secret qui est cette fascination morbide ; et, au bout de ce secret, aussi éclatante que le tableau macabre de Brueghel, jaune et noire comme un orage sur notre civilisation hébétée, un possible triomphe de la mort.

Miroir de votre vœu de mort. Vous vous répétez, je me répète également.

C’est elle, cette pulsion de mort, qui tire les fils qui nous gouvernent dans une guerre au virus que nous sommes, pourtant, en train de gagner.

C’est vous qui le dites. Si nous sommes en train de la gagner, c’est grâce à ces scientifiques qui tâtonnent, cherchent, trouvent, reviennent sur leurs premières propositions, doutent. C’est grâce aux masques aussi. Aux découvertes quotidiennes, sur l’aérosolisation, l’orage « cytokinique » etc.

C’est elle qui anime, dans une civilisation désespérée d’elle-même, la grande tentation suicidaire dont le coronavirus aura été la divine surprise.

Je pourrais parler de ça mais ça serait trop long. Oui nous avons ici un problème. Le problème d’une civilisation qui veut être propre, clean, sans corps, sans mort…

C’est elle qui, s’autorisant du Roi Corona, distancie les humains les uns des autres comme s’ils n’étaient que miasmes, glaires et sources d’infection.

Exagération poétique sans sens. Elle les rapproche en fait. Comme l'uniforme à l'école, parfois, gomme les différences. Tant de pays l'ont adopté. C'est un débat possible.

Et c’est elle qui voudrait les condamner à une vie de zombies, gagnés par la méfiance, l’égoïsme, le repli et le sacrifice, hâtivement consenti sur l’autel de l’hygiénisme, de cette ouverture confiante à l’autre qui est le fondement même de la socialité.

Vous oubliez le respect, l’amour de l’autre, l’amour de la vie qui peut impliquer un certain nombre de sacrifices mineurs.

Les Japonais sont-ils vraiment des êtres méfiants, égoïstes ?

Je ne crois pas. C’est ici affaire de responsabilité, d’élan vers l’autre. J’y vois moi, de la solidarité. Ces rues remplies de visages masqués sont autant de rues solidaires, de rues pleines du sentiment de faire partie d’un peuple, d’un genre humain fragile, qu’il faut préserver.

Là où vous voyez de la laideur, BHL, j’y vois de la beauté.

Sauf retournement en faveur de la vie et de ce qu’elle implique de liberté, d’espoir et de fraternité, il y a là une très mauvaise nouvelle.

Désolé d’être si en désaccord avec vous. Nous sommes chacun ici sur une rive opposée. 

 

 

2 commentaires:

  1. Merci beaucoup Monsieur Rochant ! Merci beaucoup !

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  2. Bravo! Excellente réponse ! M. Henri-Lévy, que j’admire par certains côtés, pratique sans retenue l’exagération littéraire, poétique (comme dit M. Rochant), qui transforme des mesures bien intentionnées, ayant un but purement pratique, en signes avant-coureur d’une apocalypse philosophique et sociale. Des restrictions exceptionnelles et relativement légères de la liberté, dictées par un contexte exceptionnel, font systématiquement l’objet d’une dramatisation échevelée, ce qu’on appelle parfois du «délire d’interprétation».

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